Compte Rendu Du Stage de Direction à Sisteron

Compte Rendu Du Stage de Direction à Sisteron

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L'Orchestre de l'Indépendante m'a offert un stage de direction d'Harmonie qui a eu lieu le 23 et 24 avril 2016 à Sisteron.

Présentation

Le formateur était Philippe Dulat, Professeur de Direction d'Orchestre au CNRR de Nice, et accessoirement titulaire de 6 Prix du CNSMD de Paris et de 4 Prix Internationaux.

Bref, aucun doute qu'il s'agit de quelqu'un de très expérimenté et doué !

Voici les sujets que nous devions aborder, selon la brochure qu'on nous avait envoyée :

  • Préparation physique, énergétique et mentale // Placements, postures et positions dans l'espace.
  • Apprentissage des bases techniques de la transmission gestuelle non verbale du "Conducteur" qu'est le Chef à tout Orchestre ou Ensemble, de quelque nature qu'il soit.
  • Transmission des fondamentaux des voix et des instruments dans ce qu'ils ont en commun.
  • Prise de conscience et Connaissance de soi dans l'acte de direction.
  • Approche de partition et non analyse // formes / styles / systèmes harmoniques / conduite de lignes.
  • Disposition "sonologique" des ensembles et orchestres, fonction de l'écoute humaine.
  • Monstage d'un Programme // Constitution de Répertoires

Sur la brochure, il y a aussi une méthode qui est proposée, la voici :

  • Chantez la partition.
  • Indiquez les tonalités et les cadences.
  • Indiquez les groupements de mesures (carrues entre autres).
  • Détachez clairement les motifs et les thèmes (conclusion de ceux-ci par des cadences).
  • Repérez ensuitez les éléments utilisés (variations, développements...), en un mot le type de construction.
  • Notez enfin la forme (la structure) directement sur vos conducteurs en parties et sections.

Et aussi, une liste de partitions à imprimer, et, surtout, à préparer !

  • La grande porte de Kiev, de Moussorgski, arrangé par J.C Amiot
  • Oblivion, de Piazolla, arrangé par Lorenzo Pusceddu
  • L'allegretto de la 7eme Symphonie de Beethoven (dire "Bétov" pour avoir l'air de s'y connaître), arrangé par Douglas Court
  • L'air sur la corde de Sol, de notre ami Bach (prononcer à l'Allemande pour paraître expert (Barrr)), arrangé par Ofburg
  • Bohemian Rhapsody, de Freddie Mercury, arrangé par Philip Sparke
  • L'hymne à la nuit de Jean-Philippe Rameau, arrangé par Tony Chesaux

Déroulement

Arrivée à Sisteron

Je ne suis pas allé seul à ce stage, ma copine est venue avec moi. Le stage devait commencer le samedi matin, alors nous sommes partis vendredi.

En arrivant à Sisteron, on est directement marqué par l'immense rocher qui fait face à la ville, de l'autre côté de la Durance.

Il y a une citadelle posée sur le rocher en face. C'est un peu Minas Tirith dans la vraie vie.

Comme j'ai de la chance, j'ai un cousin et sa copine qui habitent là-bas, au village-même, et j'ai profité d'avoir de l'argent offert par l'Indépendante pour l'hébergement, pour leur offrir des pizzas afin de les remercier.

Bref, nous sommes arrivés le vendredi soir, très stressés de ne pas avoir eu vraiment le temps de préparer les conducteurs, parce que nous les avions eu la semaine d'avant, et qu'on a eu à peine le temps de trouver un imprimeur.

Première journée

Le rendez-vous était donné à 8h45 à l'école de musique, c'était à deux pas de chez mon cousin.

On arrive, et on rencontre les premiers arrivant, un venant de Nice et l'autre de Marseille.

Ils avaient fait le trajet le matin-même et étaient donc partis très tôt.

Bref, tout le monde arrive peu à peu, on nous ouvre la salle.


Philippe Dulat est un personne assez sympathique, qui a toujours une blague pour détendre les gens. "Pour décontracter le diaphragme" dit-il.

Il avait bien lu nos lettres de motivation et s'est adressé à nous en connaissance de cause ; c'est assez agréable d'arriver dans ce genre de stage et de voir qu'on nous a pris en compte personnellement.

Premiers exercices

Les premièrs exercices concernent le placement, la présence, la décontraction. Il nous fait nous accroupir, les deux pieds à plat. Pour moi, et d'autres, impossible de tenir dans cette position. Alors il nous permet d'être sur la pointe des pieds. Je crois que cet exercice a pour but de nous faire prendre conscience de notre posture, de notre équilibre.

Il nous fait mutuellement nous soulever les bras, afin de sentir le poids du bras.

La musique est contenue dans le poids du bras.

Sur le même thème, il nous demande de le diriger au piano. Il nous propose une suite d'accords, et nous demande, avec la seule position de nos bras, de lui faire jouer l'accord auquel nous pensons.

Là, j'apprend une chose importante, que l'on sait intuitivement. (Il y a beaucoup de choses comme ça)

La position du corps, surtout des bras, contient l'harmonie.

Le bas du corps est secondaire dans l'acte de diriger, il sert surtout à avoir une assise stable à partir de laquelle il faut travailler.

La matinée est donc surtout une prise de contact avec le corps.

Un autre exercice intéressant qu'il nous propose, est de simplement lever les bras, en sentant bien le poids de ceux-ci, puis, sans transmettre aucune intention, de prendre contact avec un partenaire, pour, simplement, être là, être présent, afin de provoquer l'écoute.

La présence à l'autre est primordiale pour être écouté.

Repas de midi

On bénéficie d'un tarif de groupe pour un restaurant. Le Tivoli

Je crois que je me suis rarement régalé comme ça !

Au repas, en discutant avec les convives, on se rend compte que la plupart des stagiaires sont aussi des élèves de Philippe Dulat au Conservatoire.

Bonjour la pression !

Cours du Samedi Après-midi

L'après-midi, ça se corse.

D'un coup, on a dû chanter les partitions (qu'on avait pas pu travailler).

On a commencé à stresser légèrement.

On ne s'est pas attardé sur l'analyse de la partition, on a tout de suité été dans la direction à proprement parler.

Beaucoup de choses, qui sont allées très vite.

J'ai quand même pris quelques notes.


Tout d'abord, la spatialisation du sonologique de l'orchestre.

Ce qui est reçu par l'oreille droite, chez la plupart des gens, est ressenti brut, non filtré, tandis que ce qui est reçu par l'oreille gauche, à cause du placement du centre auditif, est filtré et a plutôt trait à l'émotionnel.

On en tire une façon de placer les instruments qu'on a retrouvé dans les orchestres , par pure expérience emprique, depuis très longtemps.

A gauche l'aigu (mélodie, donc émotion), et à droite, le grave(c'est l'assise, donc c'est brutal, raccroché à la terre).

Et, en profondeur, à l'avant ce qui est faible, à l'arrière ce qui est puissant.

Selon notre formateur, il est important de savoir dans quelle tonalité pensent les instrumentistes (les joies des instruments transpositeurs).

Il faut avoir conscience de la façon qu'ils ont d'émettre leur son. Par exemple, un tuba a besoin de plus d'élan pour sortir une note au bon moment, puisque c'est un instrument imposant qui demande beaucoup de souffle.

Le tempo doit être calé sur l'instrument qui émet le plus difficilement le son.

Il existe deux façon de battre; la façon métrique, et la façon rythmique.

Dans une écritrure de type "Choral", on choisira plutôt la battue rythmique, qui consiste à diriger les évènements musicaux, plutôt que d'indiquer les mesures.

Il est important de spatialiser le geste.

Il faut être engagé 1 temps avant l'orchestre.

La "naissance du temps" sert de point d'orgue dans un style syllabique.

On peut basculer d'une battue à l'autre si besoin est.

Si, par exemple, le son commence un demi temps après le temps 1, il est possible "d'attendre" l'orchestre. Il faut l'attendre, tout en dirigeant.

Il y a 3 schémas de battue possibles : Alla breve, le triangle, et la croix. Tout le reste n'est qu'une variation là-dessus !

Il n'y a toujours qu'une seule levée dans la battue.

Si le rythme est difficile, travailler le phrasé, car ce dernier gouverne le rythme.

Si un legato et un staccato sont superposés, il faut diriger le legato, car il est plus aisé de jouer un staccato par dessus un legato que l'inverse.

Le batteur doit jouer en fonction de l'orchestre, et non l'inverse, autrement on obtient un son dur.

Le chef endosse le rôle de plusieurs personnages pour transmettre l'élan musical, c'est un peu du théâtre.

C'est assez fatigués que nous sortons de là le soir !

Le dimanche

On était cette fois-ci conviés à la salle de répétition de l'harmonie de Sisteron.

On s'est fait avoir, comme il faisait chaud chez nous, on est parti habillés léger...

Le vent de Sisteron est froid et fort.

Le matin

La salle de répétition est décorée de nombreux instruments anciens, qui, certainement, ont dû appartenir à des musiciens aujourd'hui décédés. C'est à la fois un bel hommage et un peu glaque aussi.

Il y a notamment une sorte de trombonne revêtu de cuir. Je n'ai aucune idée de ce que c'était !

Philippe Dulat prend les commandes de l'orchestre. Il les replace, puis leur fait faire un accord.

Ce qui est particulièrement impressionnant, c'est la facilité avec laquelle il est capable d'obtenir un son propre, agréable et juste. Tous les stagiaires qui sont passés devant l'orchestre ont eu un son différent avec l'orchestre. De quoi supprimer l'idée que le chef d'orchestre ne sert pas à grand chose !

Nous passons ensuite tour à tour sur les morceaux prévus. Le tout est filmé, afin que nous puissions nous revoir en fin de journée, pour faire un bilan.

J'ai noté quelques idées à retenir :

  • Il faut demander des choses précises techniquement à l'orchestre ; plus on est précis dans ce qu'on demande, plus on a de chance d'avoir un résultat.
  • Il faut être conscient de ce que font les bras, ne pas les laisser bouger sans maîtrise; comme dit, la musique est dans le bras.
  • Le temps réel et le temps ressenti diffèrent ; il faut être conscient de cela.
  • Dans la battue, si l'on veut que l'orchestre joue plus fort, ce n'est pas tant l'ampleur du geste qui compte, que sa vitesse ; plus les "boucles" sont rapides, plus le son est fort.
  • Une battue, "double legato" forme plus de boucles, tout en gardant les mêmes points d'appui que dans une battue legato normale.
  • Il faut se concentrer sur le fondement de la musiqe, c'est à dire, la plupart du temps, les basses, notamment lorsque l'orchestre n'est pas de haut niveau.
  • Pour travailler une pièce, il faut d'abord, chez soi, lire la musique en laissant le corps s'exprimer librement, vivre la musique à fond sans entrave. Une fois que le ressenti est bien clair, le travail consiste à exprimer ce ressenti de façon maîtrisée, canalisée dans les bras, afin de gagner en clarté, et donc en efficacité.
  • Lors du travail avec l'orchestre, il faut travailler à obtenir immédiatement ce que l'on veut, et, en un geste précis, transmettre le maximum d'information.
  • Avec les vents, en tant que chef, on peut décider de gérer leur respiration ; si un passage demande à être piano, il suffit de donner l'instruction de ne pas respirer jusqu'à tel moment; il en résultera immédiatemment une répartition de la quantité d'air sur une plus longue phrase. Et, chez les vents, plus d'air égale un son plus fort, et inversement !

Je suis passé sur l'allegretto de Beethoven, ainsi que ma copine.

Le midi

L'orchestre nous a offert un buffet, avec d'énormes pizzas, et quelques mets préparés par les musiciens eux-mêmes !

Il y avait des canelés délicieux et, il me semble que c'est comme ça qu'on appelle ça, un strudel.

C'était vachement bon

Après-midi

Nous avons passé le reste de l'après-midi à visionner nos passages, en bénéficiant des conseils du formateur (j'ai tout mis dans la liste d'avant).

En me revoyant, j'ai clairement identifié un de mes gros problèmes, à savoir l'utilisation de la main gauche, dont je ne me sers quasiment pas.

J'y travaille.

Apparemment, j'ai eu le tempo que je voulais sans problème, et j'avais une bonne présence. C'est toujours plaisant à entendre !

Bref, nous avons fini bien plus tard que ce qui était prévu, le formateur ne comptant visiblement pas ses heures pour parler de direction ! Nous nous sommes quittés avec l'invitation à venir à d'autres stages, organisés régulièrement dans la région.

Conclusion

Ce stage m'a permis de renouer avec une certaine approche de la musique, que j'avais perdu depuis un moment.

J'ai aussi confirmé une idée qui me trotte dans l'esprit, à savoir que les bases, si elles sont bien acquises, permettent d'aller très loin, sans avoir besoin d'aide; notre formateur ne s'est pas tellement épanché sur les problématiques techniques, et s'est surtout attaché à nous recadrer sur notre base; présence à soi et aux autres, bon relâchement du bras.

Depuis, lorsque je sens que je ne suis pas très efficace devant l'orchestre, je repense à ces bases et je peux aller plus loin sans forcément réfléchir.

En tout cas, c'est un très beau cadeau que m'a offert l'Indépendante, et, encore une fois, je les remercie !